Management : comment briser les silos entre les générations ?
Cette mixité est un véritable défi pour les entreprises qui doivent faire cohabiter ces générations, chacune disposant de ses propres codes, méthodes, vision du travail, avec un rapport à la hiérarchie et aux technologies spécifique. Des différences qui peuvent engendrer tensions et incompréhensions dans les murs des entreprises. Ce n’est pourtant plus un secret : des salariés épanouis impactent positivement la performance et renforcent l’attachement à l’entreprise. Les collaborateurs qui se sentent bien au travail sont plus créatifs, plus détendus et en meilleure santé physique et morale.
Entreprises et managers ont donc tout intérêt à faciliter la cohabitation et la cohésion intergénérationnelle pour faire du bureau – si ce n’est un lieu d’épanouissement – un environnement serein et dénué de tension pour l’ensemble des salariés.
Mais quelles sont réellement les différences entre ces générations ? Quels freins les entreprises rencontrent-elles dans leur intégration et dans leur management ? Comment faire cohabiter tout le monde ?
Le savoir, c’est le pouvoir !
Conseil qui parait simple mais qui est pourtant primordial : pour bien faire cohabiter des individus aux personnalités aussi différentes, il est indispensable de savoir à qui on s’adresse réellement.
- Les baby-boomers (nés entre 1946 et 1964) considérés comme les « seniors », forment une génération stable, loyale, qui accepte le management vertical. Les baby-boomers ont vu leur statut social défini par le travail et sont particulièrement investis auprès de leur entreprise. Ils ne craignent pas de mettre les mains dans les outils technologiques et veulent que leurs compétences techniques soient le plus à jour possible.
- La Génération X, (née entre 1965 et 1980) tout comme les seniors, possède un fort attachement à l’entreprise et au statut social conféré par son travail. Les personnes de cette génération sont celles qui, même parties « de peu », ont pu se réaliser en entreprise avec la possibilité de gravir les échelons. Peu à l’aise avec les changements, la Génération X privilégie, comme les Boomers, une communication traditionnelle en physique ou par téléphone. Aujourd’hui assez sure d’elle au travail, elle possède un côté compétitif qui peut gêner les plus jeunes.
- La Génération Y ou Millennials (née entre 1981 et 1995) est surement celle qui a marqué la rupture la plus importante avec les précédentes. Première génération à évoquer ses envies de liberté, souhaitant multiplier les expériences, elle privilégie l’autonomie, le sens de son travail et les perspectives d’évolution. Elle a moins confiance en l’entreprise que les générations d’avant. Souvent décriée pour sa paresse, elle a créé une divergence très nette en affirmant qu’elle travaillait pour vivre et non l’inverse.
- La Gen Z (née entre 1995 et 2010) est multitâches et habituée au changement. Elle n’a peur de rien ou presque. Assurée, en quête d’expériences « vraies », elle attend de son management qu’il se soucie de son bien-être et n’hésite pas à ouvrir le dialogue – là où les générations précédentes se montrent moins sures d’elles. Elle privilégie la communication via les outils technologiques et possède une forte volonté de se réussir « par elle-même ». Cette génération possède une défiance particulière envers l’entreprise et la hiérarchie, qui doit absolument être transverse.
Des difficultés à contourner
Si cette diversité est une réelle force pour les entreprises, elle est également génératrice de tensions qui peuvent entraver la bonne entente et impacter négativement le collectif :
- Des modes de communication qui différent: Boomers et Génération X privilégient la communication en face à face ou par téléphone. Les Millennials sont souvent tétanisés à l’idée de décrocher leur téléphone. Comme la Gen Z, ils préfèrent largement la communication écrite par chat ou email. Une difficulté pour les managers, qui doivent composer avec chacune de ces préférences.
- Des effets de groupe: naturellement, des groupes composés de membres de la même génération se forment. Ils se retrouvent souvent dans leurs réflexions, leurs ambitions, leurs aspirations, leur quête de sens… Si chaque groupe est soudé, cette cohésion existe peu entre les groupes et donc entre les générations, qui ont plus de mal à se parler et à travailler ensemble.
- Des complexités au niveau managérial: il n’est plus rare que des seniors soient managés par des plus jeunes. La pyramide des âges et de transmission des savoirs « classique » s’en trouve inversée et c’est souvent difficilement accepté. Cette question de légitimé peut amener les managés à faire preuve de défiance envers les plus jeunes. Ils risquent de ne pas prendre au sérieux leurs managers et avoir du mal à les respecter.
- Des différences de rythme: les plus jeunes générations cherchent un équilibre vie pro vie perso, là où les générations précédentes ont pris l’habitude des horaires à rallonge et d’un présentéisme un peu passé de date qu’il est difficile de changer. Boomers et X voient d’un mauvais œil ces plus jeunes qui ont leur manteau sur le dos à 18 pétantes ! Un décalage de rythme que les managers là aussi doivent prendre en compte : exit les réunions à 18h30.
- Et des différences de vision de la société dans son ensemble : si les plus jeunes générations sont perçues comme moins fidèles à l’entreprise que leurs ainées, c’est car la société dans son ensemble évolue. Recherche d’équilibre vie pro / perso, certes, mais les entreprises doivent comprendre que les plus jeunes ont une défiance plus élevée face aux organisations.
Mais alors, comment transformer ces difficultés en opportunités ?
Travailler la mixité intergénérationnelle
Aucune génération n’est meilleure qu’une autre. L’apprentissage n’est pas à sens unique et chaque groupe générationnel peut enrichir les autres. Le management doit favoriser les échanges et la collaboration : c’est ce qu’on appelle la mixité intergénérationnelle.
- Travailler sur la culture d’entreprise dans son ensemble: une culture d’entreprise doit s’entretenir pour être efficace. Vos valeurs sont-elles toujours alignées avec votre réalité ? En enrichissant votre culture d’entreprise avec de nouveaux axes forts comme l’entraide et l’apprentissage en continu entre pairs, vous créerez une dynamique positive. Prenez en compte les attentes de ces quatre générations et diffusez les nouvelles informations à l’ensemble de vos collaborateurs.
- Améliorer l’onboarding: peu importe les générations qui intègrent l’entreprise, il faut favoriser la mixité intergénérationnelle dès le début. Prévoyez une semaine d’intégration avec formations et temps d’échanges informels pour créer du lien dès les premiers jours et prévoyez des points trimestriels informels pour suivre le bien-être de tous vos collaborateurs.
- Faire travailler les équipes en mode projet : mixer les générations et leurs différentes méthodes de travail est enrichissant pour les équipes et l’entreprise. Cela permet de décloisonner les groupes, pousser à la rencontre, créer de la solidarité en interne, et aborder différemment les projets pour une réussite collective.
- Mettre en place le « reverse mentoring» (ou tutorat inversé) : il s’agit de créer un binôme de générations différentes, dans lequel le membre le plus jeune va initier le plus senior à l’usage de nouveaux outils ou façon de travailler de façon informelle. Outre une meilleure le reverse mentoring responsabilise les jeunes générations en leurleur permettant d’être plus exposées.
- Dans cet esprit, certaines entreprises ont mis en place un shadow comex : cet organe miroir du comité exécutif de l’entreprise réunit les plus jeunes générations pour éclairer les dirigeants sur les mutations à venir, et porter un regard critique sur la stratégie de l’entreprise et ouvrir la voie à de nouveaux projets souvent très innovants voire disruptifs.
A situation inédite, moyens inédits. Si la cohabitation de ces 4 générations apporte son lot de tensions, les managers et DRH ont des outils à leur disposition pour lutter contre l’installation de ces failles sur le long terme. Culture d’entreprise forte, managers qui accompagnent sur le terrain, pratiques plus originales qui ont déjà fait leurs preuves : il faut rapidement se saisir de ces méthodes pour améliorer les relations.
Car ce n’est pas fini ! Dans quelques années, la génération Alpha arrivera sur le marché du travail avec ses propres codes et aspirations. Les entreprises ont donc tout intérêt à agir dès maintenant et travailler à la cohésion des générations. Une fois n’est pas coutume, les organisations qui savent anticiper les évolutions du monde du travail sont celles qui performeront à long terme.